La première chambre civile de la Cour de cassation a rappelé, le 30 septembre 2020, le cadre légal relatif à la perception d'une indemnité exceptionnelle par un mandataire judiciaire. Nexem vous propose ici l’analyse détaillée de cette décision réalisée par son partenaire Le Sens de la Mesure, cabinet de conseil spécialisé dans le champ de la protection juridique des majeurs.

Le contexte

Mme X a été placée sous tutelle en 2014. M. Z, mandataire judiciaire à la protection des majeurs, a été désigné en qualité de tuteur d’octobre 2014 à avril 2017, date à laquelle le juge des tutelles a ouvert une mesure d’habilitation familiale et désigné M. X, le fils de Mme X, pour la représenter.

Par déclaration au greffe du 10 septembre 2018, M. X a demandé la condamnation de M. Z à lui payer la somme de 3 169 euros au titre d’un trop-perçu de rémunération.

Par jugement rendu le 9 avril 2019, le tribunal d'instance de Sens rejette sa demande.

La décision de la Cour

Pour rejeter la demande en restitution d’un trop-perçu, par le mandataire judiciaire à la protection des majeurs, sur les ressources de la personne protégée, le tribunal d’instance retient qu'au début de sa mission, M. Z a été contraint d'effectuer un travail particulièrement important pour retrouver les pièces fiscales et autres justificatifs qui avaient disparu ou avaient été jetés.

En statuant ainsi, sans examiner, comme il le lui était demandé, si le prélèvement sur les ressources de Mme X n'excédait pas les montants fixés par les textes susvisés, le tribunal, qui n'était pas saisi d'une demande de restitution d'un trop-perçu au titre de l'indemnité exceptionnelle, a privé sa décision de base légale.

Par conséquent, la Cour de cassation casse et annule le jugement du 9 avril 2019 rendu par le tribunal d’instance de Sens.

L’analyse du Sens de la Mesure

La Cour de cassation, après avoir rappelé l'ensemble du cadre juridique relatif à la perception d'une participation financière de la personne, conclut qu' « il se déduit de l'ensemble de ces dispositions que la participation de la personne protégée au financement de la mesure est fonction de ses ressources et que ce n'est que lorsque le juge des tutelles est saisi d'une demande d'indemnité exceptionnelle que des diligences particulièrement longues ou complexes peuvent être prises en considération. »

En l'espèce, le mandataire en question n'a pas demandé d’émoluments complémentaires auprès du juge et, de fait, a prélevé de son propre chef le montant qu'il considérait comme une indemnité exceptionnelle sur les comptes de la personne[1].

Observation complémentaire

La Cour rappelle également utilement qu' « à titre exceptionnel, le juge peut, après avoir recueilli l'avis du procureur de la République, allouer au mandataire judiciaire à la protection des majeurs, pour l'accomplissement d'un acte ou d'une série d'actes requis par l'exercice de la mesure de protection et impliquant des diligences particulièrement longues ou complexes, une indemnité en complément des sommes perçues au titre du premier alinéa lorsqu'elles s'avèrent manifestement insuffisantes. »

Il s’agit ici du principe de l’article L 471-5 du code de l’action sociale et des familles, peu mis en lumière en pratique, et qui revient explicitement à ce que le mandataire soit, à notre avis, en mesure de démontrer clairement que les sommes perçues en participation financière sont insuffisantes – consommées ? - avant toute éventuelle demande d’émoluments complémentaires de sa part.

Idée-force de la décision de la Cour

La participation de la personne protégée au financement de la mesure de protection est fonction de ses ressources et les diligences particulièrement longues ou complexes que le tuteur est contraint d'effectuer ne peuvent être prises en considération que si le juge des tutelles est saisi d'une demande d'indemnité exceptionnelle.

A propos du cabinet Le Sens de la Mesure

Le Sens de la Mesure est le premier cabinet indépendant de veille analytique et d’aide à la prise de décision à destination des professionnels exerçant des mesures judiciaires à la protection des majeurs adultes. Cliquez ici pour plus d’information sur ce partenaire


[1] NdA : d’où une procédure en restitution de trop-perçu.