La Chambre criminelle de la Cour de cassation vient, dans un arrêt du 13 octobre 2020, de renvoyer une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel concernant l'information d'un tuteur ou d'un curateur d'une perquisition d'une personne en protection, et ce, en phase d'enquête. Nexem vous propose ici l’analyse détaillée de cette décision réalisée par son partenaire Le Sens de la Mesure, cabinet de conseil spécialisé dans le champ de la protection juridique des majeurs.

Le contexte

X Y a présenté, par mémoire spécial reçu le 27 juillet 2020, une QPC à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 30 janvier 2020, qui, dans l’information suivie contre lui des chefs de viol aggravé, agression sexuelle aggravée, pédopornographie, a prononcé sur sa demande d’annulation d’actes de la procédure[1].

Le questionnement et la QPC formulée par la Cour de cassation

Si le curateur ou le tuteur d’un majeur protégé n’est pas averti d’une perquisition en préliminaire concernant ce dernier, il peut en résulter que ce majeur protégé ne soit pas assisté dans l'exercice du droit, que lui reconnaît l’article 76, alinéa 1 du code de procédure pénale (CPP), de donner, en connaissance de cause, son accord à cette mesure d’investigation et prenne ainsi une décision contraire à ses intérêts.

Ainsi, “les dispositions de l’article 706-113 du code de procédure pénale sont-elles contraires au principe du respect des droits de la défense et d’une procédure pénale juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties, garanti par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, en ce qu’elles ne prévoient pas que le curateur ou le tuteur d’un majeur protégé soit averti d’une perquisition concernant ce dernier effectuée en phase d’enquête ?”

L’analyse du Sens de la Mesure

Sur le fond, la situation ressemble aux débats ayant eu lieu entre 2017 et 2019 au sujet de la garde à vue d’une personne en protection.

Le 20 juin 2018, le Conseil constitutionnel avait été saisi[2] d’une Question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 706-113 du code de procédure pénale.

Dans sa version originelle datant de la loi du 5 mars 2007, cet article prévoyait l’obligation légale faite aux acteurs de la procédure pénale d’aviser le tuteur ou le curateur d’un majeur protégé d’un certains nombres d’évènements procéduraux mais ne prévoyait rien concernant son placement en garde à vue ou son audition libre.

Dans une décision du 14 septembre 2018, le Conseil constitutionnel a jugé le premier alinéa de l’article 706-113 du CPP contraire à la Constitution.

L’article 48 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 a modifié la première phrase du premier alinéa de l'article 706-113 du code de procédure pénale, ainsi que les articles 706-112-1 et 706-112-2 du même code.

Sur la forme, et à l’instar de ce que l’on peut constater en matière de garde à vue, les dimensions pratiques et opérationnelles de ces garde-fous législatifs se heurtent parfois aux questions de flagrance, d’urgence, ainsi qu’aux positionnements - et disponibilités diverses - des MJPM, qui plus est si la personne a déjà valablement fait appel à un avocat et/ou à un médecin.

A propos du cabinet Le Sens de la Mesure

Le Sens de la Mesure est le premier cabinet indépendant de veille analytique et d’aide à la prise de décision à destination des professionnels exerçant des mesures judiciaires à la protection des majeurs adultes. Cliquez ici pour plus d’information sur ce partenaire

[1] NdA. De par la nature de la décision de renvoi, les faits sont réduits à leur plus simple expression.

[2] Crim. 19 juin 2018, n° 18-80.872.