Cass. soc., 12 décembre 2018, n° 17-17680

Dans cette affaire, lors de l’une de ses permanences nocturnes, un agent de sécurité, en poste depuis 26 ans, est surpris à dormir sur son poste de travail, un trousseau de clés posé juste devant lui, laissant ainsi l’accès aux locaux libre et sans surveillance. Son employeur le licencie immédiatement pour faute grave, estimant que son salarié a manqué « à une obligation essentielle de son emploi touchant à la sécurité des personnes et des biens ».

Pour sa défense, le salarié, arguant avoir réalisé 72 heures de travail la semaine en question, insiste sur la défaillance de son employeur à préserver sa santé et sa sécurité, violant ainsi son « droit à la santé et au repos ». En effet, ni la loi ni la convention collective applicable en l’espèce n’autorisent une telle durée de travail sur 7 jours.

Retenant que la fatigue excessive du salarié était à l’origine de sa défaillance, la Cour de cassation déclare le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A retenir. De manière générale, dormir sur le lieu de travail constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement[1]. Toutefois, le non-respect des durées maximales de travail et la mise en danger de la santé et de la sécurité des salariés en découlant, sont mis en avant par les juges dans cette affaire.

En effet, en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés, l'employeur est tenu à une obligation de sécurité de résultat, dont il doit assurer l'effectivité et dont le non-respect constitue, en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle, une faute inexcusable[2].

En parallèle, l'employeur doit également veiller à la bonne santé physique et mentale de ses salariés[3]. A cette fin, il doit prendre toutes les mesures nécessaires au maintien d'une ambiance et d'une organisation du travail saines et pérennes[4].

En l’espèce, la décision de faire travailler un salarié pendant 72 heures, pendant 7 jours, a été prise en méconnaissance des règles légales et conventionnelles de durées maximales de travail - fixées à 44 heures dans le secteur -, induisant une fatigue excessive du salarié.

En tout état de cause, si l’un de vos salariés est surpris en flagrant délit de sommeil pendant son temps de travail, pensez à vérifier que les durées maximales de travail ont bien été respectées avant de le sanctionner.

Par ailleurs, sachez que les juges prennent également en compte l’ancienneté du salarié, son passé disciplinaire, ainsi que les circonstances entourant les faits reprochés pour apprécier le fondement du licenciement. En ce sens, un agent de sécurité s’étant assoupi une seule fois pendant son service de nuit (ce fait constituant un fait isolé) et n’ayant jamais fait l’objet d’aucun avertissement ou reproche antérieur, les juges ont estimé que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse[5].

Autrement dit, le dossier disciplinaire du salarié aura son importance avant d’envisager de le licencier.


[1] CA Montpellier, 12 avril 200, n° 98 159 et CA Versailles, 26 juillet 2011, n° 10-02784.

[2] Cass. soc., 28 février 2002, n° 99-18389.

[3] Article L. 4121-1 du Code du travail.

[4] Cass. soc., 22 juin 2017, n° 16-15507 ; Cass. soc., 21 juin 2017, n° 15-24272.

[5] Cass. soc., 22 sept. 2015, n° 14-13965.