Management, de quoi parle-t-on ?

Le management désigne un ensemble de valeurs et de principes systémiques qui déterminent la bonne organisation et la mobilisation de ressources matérielles, immatérielles et surtout humaines de l’association. Cet ensemble est animé par la fonction managériale de l’association qui veille à ce que chaque individu contribue au produit ou service fournit par l'organisation.

Cette fonction managériale constitue donc une ressource charnière des organisations et peut se schématiser en deux grands cercles de prérogatives selon le niveau hiérarchique et la capacité d’agir temporellement sur l’organisation de l’association :

  • Le cercle de management stratégique ou secondaire, disposant de prérogatives managériales et hiérarchiques sur un périmètre étendu lui permettant d’agir sur l’ensemble de l’organisation en définissant des orientations stratégiques échelonnées dans le temps. A titre d’exemple, nous retrouvons sur ce périmètre les directeurs généraux et certains directeurs des ressources humaines qui ont une capacité de structuration de la stratégie associative et de sa déclinaison dans l’un des grands piliers de l’association à savoir : l’organisation, l’offre de service ou le capital humain (cf. outil n°2  du groupe de travail Nexem : guide d’accompagnement et d’aide à la déclinaison des projets stratégiques, en fin d'article). Ainsi, un DRH participant à la stratégie de développement des compétences pour répondre à une orientation stratégique qui porterait à échéance de 5 ans sur le développement de la logique de parcours de vie en assurant les transitions sans rupture entre les différentes solutions institutionnelles ou hors établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS), disposerait de prérogatives relevant du cercle de management stratégique.
  • Le cercle de management intermédiaire/de proximité ou encore primaire, disposant de prérogatives managériales et hiérarchiques restreintes à un groupe d’individus lui permettant d’agir sur ce dernier en application des principes posés et les moyens offerts par l’organisation. Dès lors, la mise en place d’une politique stratégique au sein de son association requiert de questionner l’ensemble du système qui entoure les managers. La mise en place d’une telle politique induit de veiller à ce que le système managérial confie la capacité d’agir aux managers et leur permette d’assurer les rôles et responsabilités qui leur incombent. Cette déclinaison doit permettre de créer un lien cohérent entre la vision issue des prérogatives du management stratégique et les possibilités d’action du management intermédiaire.

Ainsi, poser la question du management au sein de son association conduit indéniablement à repenser son organisation et le système qui entoure ces deux types de management.

Le manager, un agent du changement qui doit évoluer dans un environnement capacitant

Le système de management évoqué plus haut représente l’ensemble des éléments qui viennent orienter l’action managériale : des incitations données jusqu’aux marges de manœuvre laissées. Ces éléments se retrouvent dans l’ambition, la stratégie et les valeurs de l’association, les politiques et processus RH, les modes de fonctionnement quotidiens. Ils peuvent être explicites (documents formalisés sur le management, éléments de communication internes, procédures…) ou implicites (exemplarité, comportements induits de certains processus…)

Un système de management cohérent est un levier puissant pour faire évoluer les pratiques et comportements managériaux de manière concrète et pérenne. Il définit clairement le cadre de l’action managériale impulsée. Le manager sait donc ce qui est attendu de lui, sans malentendu. Dotés d’un périmètre d’action clair et des moyens associés pour faire face aux problématiques SQVT de leurs collaborateurs, les managers bénéficient ainsi d’une dynamique associative ayant un impact positif sur leur propre QVT.

Ce système assure également sa mise en œuvre effective via l’ensemble des leviers à disposition de l’association, ce n’est pas un guide remis et oublié, ou une formation ponctuelle. Il permet d’éviter les injonctions paradoxales dans lesquelles les managers peuvent se trouver lorsqu’une nouvelle politique interne leur confie des responsabilités sans disposer de réels moyens pour agir. Le cadre annoncé doit donc être en cohérence avec les leviers à disposition du manager.

Ainsi, raisonner en système de management permet d’envisager des travaux mêlant à la fois cercle de management stratégique et de proximité et permet de vérifier la pertinence et la cohérence de l’environnement dans lequel se trouvent les managers mais aussi de :

  • pointer les forces et les difficultés actuelles des managers par rapport à ce qui est attendu d’eux,
  • recenser les outils à disposition des managers et les évaluer au regard des enjeux stratégiques,
  • dessiner des pistes d’amélioration en lien avec l’ambition, la stratégie et les valeurs de l’entreprise.

Ci-dessous nous vous proposons une schématisation des différents champs couverts par le système managérial :

>>  Le modèle de management est la courroie centrale qui doit assurer la mise en œuvre opérationnelle de la stratégie par les collaborateurs, en respectant l’identité et les valeurs de l’association.
>> Une mauvaise articulation de ces dimensions risque de susciter des injonctions paradoxales génératrices de malaise et de perte d’efficacité.

Pourquoi parler du management et de son implication dans la SQVT ?

La perception du rôle du manager a fortement évolué avec l’évolution du rapport au travail des salariés, passant alors d’une conception de chef de service à celle de développeur de potentiels et d’accompagnant. Cette évolution des perceptions influe grandement sur les attentes que portent les collaborateurs vis-à-vis de leur manager.

Le baromètre QVT Chorum[1] met en lumière des différences de perception entre le collaborateur et le manager de proximité concernant l’action quotidienne de ce dernier :
  • les deux s’accordent globalement sur la prise en compte des propositions du collaborateur concernant le travail et sur le développement des activités au sein du service ;
  • le collaborateur perçoit plus difficilement l’action sur les conflits interpersonnels, le développement des compétences, le suivi et le soutien au quotidien ou encore le partage d’information au sein de l’équipe ;
  • le rôle du manager (ici de proximité) dans la QVT globale des collaborateurs est mis en évidence à travers les facteurs impactant la SQVT suivants : capacité d’expression et soutien au travail notamment en bénéficiant d’une bonne ambiance de travail, absence d’indications contradictoires, la formation et le développement des compétences ou encore un soutien perçu comme satisfaisant de la part du manager.

Ne pas prendre en compte ces attentes c’est prendre le risque de créer un cercle vicieux au sein de son association ayant pour conséquence une baisse d’attractivité et de la fidélisation des collaborateurs voire une hausse de l’absentéisme. De tels effets impacteraient durablement la performance et le développement de l’association dans un contexte déjà fortement marqué par une crise des vocations et une plus forte volatilité des ressources humaines au sein de certains métiers.

La fonction managériale doit donc s’adapter et évoluer vers un rôle de coordination et de développement des compétences de leurs salariés tout en garantissant une application juste des politiques de l’entreprise. Pour répondre à ces enjeux le manager apparaît comme l’acteur le plus pertinent. Il constitue la pierre angulaire de l’organisation contribuant à la fois à la définition et à la déclinaison des orientations stratégiques de l’association.

Ce rôle central lui permet d’être le premier acteur d’une politique permettant à l’association de s’adapter de manière pérenne et durable. Mais pour que la politique SQVT puisse vivre au sein de l’association, il est indispensable que les managers s’approprient et intègrent cette dernière à deux niveaux :

  • dans leurs réflexions stratégiques en intégrant la SQVT comme un élément déterminant de l’orientation de l’association dans sa recherche d’une efficience et performance durable ;
  • dans l’ensemble de la ligne managériale en questionnant le système managérial et en l’adaptant pour mettre les managers en capacité d’agir et concourir concrètement à la SQVT.

Cette appropriation doit permettre aux managers d’incarner l’ensemble des principes et actions de la politique SQVT de l’association et la considérer comme une partie intégrante de leur rôle et responsabilité. Pour y parvenir il est donc nécessaire de partager en amont un même référentiel managérial permettant de mieux s’accorder ensuite sur les actions et moyens dont doivent disposer les managers pour remplir pleinement leur rôle.

Des démarches de mobilisation managériale autour de la SQVT

  3 questions à Marc Pimpeterre,
  directeur général de l’UDAF de l’Hérault (34) :
  le rôle du manager dans la QVT au sein d'une association gestionnaire



1/ Pourquoi avez-vous initié une démarche d’amélioration de la QVT ?

M.P. : Il convient tout d’abord de souligner qu’au cœur de la stratégie, de l'ambition de l’UDAF 34 préexiste une démarche RSO (responsabilité sociétale des organisations). Notre association est pionnière en la matière et a été évaluée "niveau confirmé" par l’AFNOR depuis 2014.

La RSO se caractérise par la convergence de trois piliers : économique, social et environnementale. L’environnement du travail se doit donc de donner du sens et de motiver les équipes en les impliquant dans des projets, des groupes de travail. Le rôle du manager est un rôle d’entraînement, de relais d’information, de courroie.

La démarche d’amélioration de la QVT est complètement intégrée aux processus existants tout en appartenant à tous.

Le rôle du manager a évolué en allant du "Je donne des ordres, je contrôle, je surveille la production", soit une sorte de contremaître très axé sur la prise en charge technique (le cœur de métier du mandataire judiciaire à la protection des majeurs en est un parfait exemple), vers plus d’accompagnement dans la réalisation des missions confiées, vers le prendre soin et donc vers la QVT, c’est-à-dire vers plus de management.

Enfin, en 8 ans, notre structure a plus que doublé ses effectifs. Cela a entraîné une augmentation du nombre de cadres/managers, une réflexion sur le cadre des délégations avec une augmentation des zones à risque, que ce soit dans l’exercice de métiers ou dans l’activité RH en elle-même. Il faut dire que le climat social est fragilisé par un environnement conventionnel compliqué et des marges de manœuvre limitées.

L’ensemble de ces éléments nous a entraîné vers un travail partagé et collectif avec l’ensemble des instances représentatives du personnel (IRP), la médecine du travail et des soutiens techniques extérieurs (réseau ARACT…).

2/ Comment s’est déroulée la démarche ?

M.P. : En nous appuyant sur les axes de travail développés dans le cadre de la RSO sur les conditions de travail, nous avons mis en place, en 2016, une action visant à rédiger une charte des valeurs managériales. Grâce à l’accompagnement d’un prestataire extérieur, avec des animations (brainstorming en petits groupes...), des idées fortes se sont dégagées. Celles-ci ont été validées par la direction pour être ensuite pleinement intégrées à notre système qualité global visant à donner des outils, des repères et des valeurs partagés par les managers. Les valeurs suivantes sont ressorties : humanisme, laïcité, éthique, bienveillance, équité, respect, accompagnement de la parentalité. Dans le même temps nous avons pu outiller les managers par la mise en place de séminaires portant sur différentes thématiques comme la définition des risques psychosociaux (RPS), la QVT, les entretiens professionnels, la gestion des conflits, la gestion des priorités… Une grande partie de ces actions a été également proposée aux équipes afin d’avoir un langage commun.

3/ Quels sont les bénéfices que vous avez pu tirer de cette démarche ?

M.P. : Dans notre démarche, les travaux sur l’égalité professionnelle n’ont pas posé de difficultés contrairement aux mesures liées à la gestion de l’équilibre des temps personnels et professionnels pour lesquelles le rôle des managers s’est amplifié.

Nous recherchons autant que possible la proximité entre le lieu de travail et le lieu de vie, ainsi 40 % des salariés de l’UDAF 34 habitent à moins de 7 km de leur lieu de travail. Nous essayons toujours de prendre en compte les temps de déplacement lors des réunions, nous ne fixons pas de réunion avant 9h00 ni après 17h00 et nous avons un projet d’accord d’entreprise sur le télétravail…

Dans le même temps, un travail baptisé « ensemble soyons collabor’actifs-2017 » et visant à améliorer les conditions de travail au sein des équipes a été initié sur une de nos antennes.

Les productions du groupe de travail Nexem dédié au management 

Afin d’accompagner l’ensemble de ces adhérents dans leurs travaux et leurs réflexions sur le management, Nexem a lancé récemment un groupe de travail dédié. Les premiers travaux du groupe arriveront dans les prochaines semaines et porteront sur la mise en place de trois outils.

1/ Un outil d’autodiagnostic managérial

Cet outil permettra aux managers stratégiques de poser un premier diagnostic sur la perception des rôles et responsabilités de leurs managers de proximité et l'alignement avec la vision stratégique. Il est actuellement en cours de test auprès des adhérents participants au groupe de travail. Il se déclinera sous la forme d’un questionnaire en version DG/DRH et manager de proximité, accompagné d’une notice explicative. Ce questionnaire visera à évaluer le degré de perception des rôles et responsabilités des managers de proximité sur cinq grandes rubriques :

  • organisation du travail,
  • animation d'équipe et développement des compétences,
  • dispositifs de contrôle, gestion du changement,
  • prise de décision
  • et délégation.

Il permettra d’établir un premier diagnostic en comparant l’air de perception du management stratégique et celle du management de proximité. Le cas échéant, il permettra de constater d’éventuels désalignements et d'identifier l’intérêt à agir sur l’évolution du système managérial de l’association ou son référentiel. A titre illustratif, l’aire de perception managériale sera transmise sous la forme suivante :

 

Dans le cadre de vos travaux sur le management et la SQVT cet outil vous permettra de faire le point sur la compréhension et la perception par le manager de son rôle en matière de santé et de qualité de vie au travail. Dans le cas d’un désalignement entre la perception du manager de proximité de son rôle et de ses responsabilités en matière de SQVT et la perception de la direction générale sur ce même thème. Dès lors, il conviendra de mettre en œuvre une démarche ciblée sur le management :

  • à titre individuel par la mise en place d’une action d’accompagnement du manager afin qu’il puisse s’approprier les attentes de la direction générale en matière de SQVT et les retraduire en actions concrètes ;
  • à titre collectif, quand vous constatez plusieurs désalignements sur une ou plusieurs thématiques. Dès lors, il convient de retravailler sur l’environnement et les moyens dédiés aux managers sur cette thématique afin qu’ils puissent agir.

2/ Un guide d’accompagnement et d’aide à la déclinaison des projets stratégiques

Ce guide s’attachera à fournir des éléments méthodologiques et des outils permettant aux managers stratégiques de disposer d’un référentiel servant la mise en place d’un projet alliant organisation et capital humain. Ce guide reposera sur l’architecture et les éléments suivants :


Le projet d’entreprise est une démarche consistant à créer une dynamique de transformation de l’association afin de concrétiser sa vision stratégique. Régulièrement, les projets stratégiques que nous observons s’attachent à développer l’offre de service et l’organisation de l’association sans mettre en résonance les changements induits avec l’un des autres grands piliers : le capital humain. Or la transformation traverse l’ensemble des « piliers » qui soutiennent l’entreprise pour une mise en cohérence de l’ensemble de l’association avec la vision stratégique. Ce guide d’aide à la déclinaison des projets stratégiques a pour vocation de vous fournir une méthodologie éprouvée, permettant de structurer votre démarche autour de grands principes d’accompagnement favorisant la gestion du changement et la QVT.

3/ Un guide d’aide à la mise en place d’une charte et d’un système managérial

Le groupe de travail management souhaite mettre à disposition des adhérents un guide d’aide à la mise en place d’une charte managériale et d’accompagnement afin d’actualiser leur système managérial. Ce guide aura pour vocation la transmission d’éléments de méthode sur la conduite et la mise en place d’un tel projet au sein de son association avec un retour de pratique d’adhérents ayant développé une telle approche.

La formalisation d’une charte managériale et la mise en place d’un système de management actualisé est un outil puissant pour l’association et pour la politique de QVT. Elle permet de formaliser officiellement le rôle et les attendus du manager dans la politique SQVT de l’association, mais également d’adapter l’ensemble du système qui gravite autour de ce dernier afin qu’il puisse être en capacité de tenir ce rôle. Dès lors, un diagnostic du système managérial permet de vérifier la pertinence et la cohérence de l’environnement dans lequel se trouvent les managers, de pointer les forces et les difficultés actuelles des managers par rapport à ce qui est attendu d’eux, de recenser les outils à disposition des managers et de les évaluer au regard des enjeux.

Le prochain épisode de la série SQVT sera dédié à l’action managériale pour motiver, impliquer et soutenir l’engagement des collaborateurs.

[1] https://www.chorum.fr/barometre/