Les entretiens professionnels ont pour objectif de cadrer de manière périodique les échanges avec le salarié autour de ses perspectives d'évolution professionnelle.

Ces entretiens, différents des entretiens d'évaluation, doivent se dérouler tous les deux ans et permettre à l'employeur et aux salariés de faire le point sur les perspectives d'évolution de ces derniers.

Pour garantir la réalisation de ces entretiens professionnels et la mise en œuvre d'actions concourant à l'évolution professionnelle des salariés, un bilan est prévu lors du troisième entretien périodique se déroulant obligatoirement lors de la sixième année d'ancienneté du salarié.

Cette obligation légale tient donc compte de la date d'embauche du salarié pour fixer le point de départ de cette dernière et les échéances de réalisation de chacun des entretiens professionnels.

Pour les salariés embauchés avant le 5 mars 2014, la date de départ de cette obligation légale est le 7 mars 2014, date de publication au Journal officiel de la loi. Ainsi, pour un salarié embauché avant cette date et dont le déroulement d'ancienneté n'a pas été interrompu par un cas de suspension, l'entretien professionnel de bilan doit intervenir au plus tard le 7 mars 2020.

Cet entretien renforcé permet notamment de vérifier l'éligibilité du salarié à un abondement correctif.

La loi du 5 mars 2014 prévoyait alors le déclenchement de cet abondement correctif si les salariés n'ont pas bénéficié :

  • des entretiens professionnels prévus à l'article L. 6315-1 du Code du travail (entretiens périodiques et de retour);
  • et d'au moins deux critères parmi les trois suivants :
    • une formation,
    • une progression salariale,
    • l'acquisition d'éléments de certification.

D'un point de vu littéral ces critères apparaissent cumulatifs. Ainsi le salarié qui a bénéficié de l'un ou l'autre des critères ne serait pas éligible à cet abondement correctif. Cependant cette interprétation serait de nature à priver le dispositif de sa substance et risquerait de faire l'objet d'une interprétation contraire par la jurisprudence.

En l'absence d'éclairages de l'administration ou de la jurisprudence, et pour plus de sécurité juridique, nous recommandons d'interpréter ces critères comme non cumulatifs et de respecter l'un et l'autre.

Ainsi, en cas de non-respect des critères ci-dessous, un abondement de 3 000 euros était versé sur le compte personnel de formation du salarié.

Impact de la loi Avenir professionnel

La loi Avenir professionnel est venue adapter les obligations issues de la loi du 5 mars 2014. Parmi les modifications notables elle prévoit notamment :

  • un renforcement de l'obligation d'information lors des entretiens professionnels ;
  • une modification des critères de déclenchement de l'abondement correctif en ne corrélant le déclenchement de ce dernier qu'aux conditions suivantes :
    • le salarié n'a pas bénéficié des entretiens professionnels prévues à l'article L. 6315-1 du Code du travail,
    • le salarié n'a pas bénéficié d'une formation autre que celle visée à l'article L. 6321-2 du Code du travail (à savoir des formations dites obligatoirement sur le temps de travail).

En procédant de la sorte, le législateur déconnecte les critères d'appréciation du parcours professionnel et les critères de déclenchement de l'abondement correctif.

Dans la ligne directe des ordonnances Macron et du renforcement du dialogue social local, ce nouveau texte prévoit la possibilité par accord d'entreprise, ou le cas échéant par accord de branche, de négocier la périodicité des entretiens professionnels, ainsi que les critères d'appréciation du parcours.

Cette opportunité permettra notamment d'adapter cette échéance aux dates d'échéances du projet associatif ou à des temps RH plus adaptés aux spécificités de votre structure.

Un droit d'option temporaire introduit par l'ordonnance n° 2019-861 du 21 août 2019

Afin de faciliter la phase transitoire en matière d'entretiens professionnels entre les obligations issues de la loi de 2014 et les obligations modifiées par la loi du 5 septembre 2018, le législateur prévoit la possibilité pour les employeurs d'utiliser, lors des entretiens professionnels de bilan, soit les critères prévus dans la loi du 5 mars 2014 soit ceux de la loi Avenir professionnel.

Cette faculté optionnelle pourra être utilisée uniquement pour les entretiens professionnels de bilan qui interviennent jusqu’au 31 décembre 2020. Pour les entretiens professionnels de bilan qui interviennent à partir du 1er janvier 2021, les critères prévus par la loi Avenir professionnel s'appliqueront.

De fait, en qualité d'employeur vous pouvez recourir jusqu'à cette date à deux options pour justifier l'atteinte de vos obligations légales en la matière :

  • appliquer les règles issues de la loi du 5 mars 2014, à savoir que le salarié doit avoir bénéficié des entretiens prévus et d’au moins deux des trois mesures suivantes : 1° avoir suivi au moins une action de formation ; 2° avoir acquis des éléments de certification par la formation ou par une validation des acquis de son expérience ; 3° avoir bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle ;
  • appliquer les règles issues de la loi du 5 septembre 2018, à savoir que le salarié doit avoir bénéficié des entretiens prévus et d’au moins une formation autre que celles visées à l'article L. 6321-2 du Code du travail. Ces formations conditionnent à l’exercice d’une activité ou d’une fonction, en application d’une convention internationale ou de dispositions légales et règlementaires.

A noter. Cette ordonnance n'apporte pas de flexibilité supplémentaire en matière d'ajustement de la périodicité des entretiens professionnels. Ainsi, dans les deux options l'ensemble des entretiens prévus à l'article L. 6315-1 du Code du travail devra être réalisé selon les échéances et périodicités prévues. Néanmoins, nous vous rappelons que la périodicité des entretiens professionnels peut être négociée par accord d'entreprise depuis la loi Avenir professionnel.

Comment se déroulera le versement de l'abondement correctif ?

Si des salariés sont éligibles à l'abondement correctif, l'employeur devra chaque année, avant le 1er mars, adresser volontairement à son opérateur de compétences la liste des salariés concernés par l’abondement correctif et le montant en euros attribué, ainsi que la somme forfaitaire (3 000 euros).

À défaut ou en cas de versement insuffisant, après mise en demeure, il devra verser le double de l’insuffisance constatée au Trésor public.

Qui pourra contrôler l'atteinte de ces obligations légales ?

Le Code du travail prévoit que le contrôle de cette obligation sera assuré par un agent de contrôle de l'inspection du travail ou un inspecteur de la formation professionnelle[1]. Ces agents pourront assurer un contrôle sur site ou sur pièce[2].

Afin de prouver la réalisation de ces entretiens, l'employeur pourra fournir les documents récapitulatifs des entretiens professionnels réalisés, ainsi que l'ensemble des éléments permettant de justifier leur réalisation (convocation, mails, courriers, attestation de refus du salarié, etc.).

Les résultats du contrôle seront ensuite notifiés à l'employeur qui pourra émettre des observations et demander à être entendu[3].

La décision de l'administration sera rendue après étude des observations écrites et des documents, ainsi que d'une éventuelle demande d'audition de l'employeur.

Les outils de Nexem pour vous appuyer dans la gestion des entretiens professionnels


[1] Article L. 6361-5 du Code du travail.

[2] Article L. 6362-8 du Code du travail.

[3] Article R. 6362-3 du Code du travail.