Il est important de signaler ici que les situations respectives de ces deux environnements en termes d’équilibre cotisation/garantie sont très différentes.

La situation des accords CHRS

Les accords CHRS affichent une situation équilibrée (légèrement bénéficiaire) selon les comptes 2019 remis tout début juillet à la commission nationale paritaire technique de prévoyance (CNPTP) CHRS. Cette situation ne doit pas masquer le phénomène de montée en charge de l’invalidité ou encore la relative fragilité du régime du fait de son périmètre restreint. Sur ce dernier point, il suffit d’une fréquence de décès plus importante sur un exercice pour déstabiliser le régime.

Concernant l’invalidité, le régime a fait l’objet d’une « remise à zéro » en 2016. Cela signifie que seuls les arrêts de travail postérieurs au 1er janvier 2016 sont pris en compte dans les comptes du régime. En moyenne, il faut 2 à 3 ans pour connaître l’effet de ces arrêts sur l’invalidité, notamment car la Sécurité sociale classe les personnes selon cette temporalité. Ainsi, les arrêts de 2016 commencent à générer des dossiers invalidité sur le régime, de même pour les arrêts de 2017, quand ceux de 2018 n’apparaissent pas encore dans les sinistres invalidité. Cette relative inertie dans la sinistralité d’un régime de prévoyance invite à la plus grande prudence sur les 5 premières années.

Les assureurs suivants se sont positionnés en réponse à l’appel d’offre :

  • AG2R,
  • Apicil,
  • Chorum groupe Vyv,
  • Malakoff Humanis (assureur actuel unique de la recommandation du régime mutualisé CHRS).

Les réponses concordantes de ces assureurs ont fait apparaître une augmentation significative de la cotisation (près de 10 % en moyenne,) notamment en raison de frais de gestion majorés.

Le mois de juin fut consacré à la négociation avec les organismes assureurs des paramètres du régime, les partenaires sociaux n’entendant pas une augmentation de tarif sur le périmètre notamment du fait de l’équilibre économique actuel du régime. Cette négociation a pu aboutir le 3 juillet avec une volonté de reconduction des conditions tarifaires actuelles de la mutualisation et un contrôle des frais de gestion en intégrant une part conditionnée à la qualité de gestion et au développement du périmètre mutualisé. Rappelons qu’aujourd’hui les tarifs mutualisés sont de 2,10 % sur la tranche A des cadres et tranches A et B des non-cadres, et 3,15 % pour la tranche B des cadres.

L’ensemble des assureurs cités ci-dessus a accepté ces conditions pour 2021 en requérant un pilotage resserré avec la CNPTP CHRS pour prévenir toute dérive potentielle. Ces assureurs sont donc susceptibles d’être recommandés dans le cadre de l’assurance et la gestion du régime mutualisé des accords CHRS. Il est à noter que ces organismes assurent également le régime de complémentaire santé interbranches du 2 octobre 2019.

Les négociations doivent aboutir le 7 septembre (CMP CHRS), l’objectif étant d’obtenir un accord valide (signé et sans opposition majoritaire) pour la fin du mois de septembre ou tout début octobre permettant ainsi aux structures qui le souhaitent de changer d’organisme assureur (cf. ci-dessous).

La situation de la CCN 66-79

Depuis 2015, le régime de prévoyance mutualisé a subi plusieurs évolutions nécessaires en raison de plusieurs phénomènes :

  • l’augmentation importante de la sinistralité sur l’arrêt de travail et l’invalidité,
  • la baisse des taux d’intérêts servis sur les provisions du régime,
  • la réforme des retraites de 2010 qui a impacté plus fortement le régime en raison de l’âge moyen d’entrée en invalidité et de l’allongement de la durée d’assurance vieillesse,
  • le classement plus rapide en invalidité par la Sécurité sociale.

Ainsi en 2015 et 2018, le régime a fait l’objet de négociations difficiles ayant conduit à une baisse des garanties (décès, incapacité et invalidité) et une augmentation des cotisations (+ 16,5 % depuis 2006). Le dernier avenant 347 n’a pu produire l’intégralité de ses effets notamment l’impact de l’augmentation de la cotisation (+11% à compter du 1er novembre 2018) en année pleine. Les efforts de 2018 ont permis de réduire légèrement le déficit affiché par le régime à -22 millions d’euros, contre -27 millions au 31 décembre 2017. C’est dans ce contexte que l’appel d’offre a été émis le 20 mars 2020 comme pour le régime des accords CHRS.

Le 20 mai, les organismes assureurs suivants ont répondu à l’appel lancé par les partenaires sociaux de la CCN 66-79 :

  • AG2R,
  • Apicil,
  • Mutex (Chorum groupe Vyv),
  • Malakoff Humanis avec AESIO.

A noter. Seuls les tenants de la mutualisation actuelle ont répondu. Ces réponses ont fait état d’une volonté de majoration du tarif de près de 10 % en moyenne ainsi qu’une majoration importante des frais de gestion. Comme pour les accords CHRS, le mois de juin a été consacré à la négociation avec les organismes assureurs. Les partenaires sociaux ont fait valoir que l’avenant 347 de 2018 n’avait pu produire intégralement ses effets et ont donc requis l’engagement des assureurs à maintenir les conditions de l’avenant 347 pour l’année 2021 ainsi que l’introduction d’un mécanisme identique aux CHRS pour les frais de gestion. Il n’était pas envisageable pour Nexem et les organisations syndicales de prévoir une nouvelle augmentation des cotisations sans connaître les effets de l’avenant 347 au regard du périmètre de mutualisation (fuites éventuelles) et du montant des cotisations.

A la date du 27 juillet, seuls l’Ocirp (assureur des rentes handicap et éducation) et Apicil ont répondu favorablement à toutes les conditions de mutualisations pour 2021 en requérant un pilotage resserré avec la CNPTP 66 permettant de prendre les décisions qui s’imposeraient dès 2021 dans le cadre des négociations. Ces assureurs ont donc consenti au maintien pour 2021 de la cotisation au niveau actuel pour des garanties identiques.

Rappelons qu’aujourd’hui les tarifs mutualisés sont de 2,33 % sur la tranche A des cadres et tranches A et B des non-cadres et 3,50 % pour la tranche B des cadres. Ce taux de cotisation pourra faire l’objet d’une évolution dans le cadre de négociations à la lumière des comptes 2020 et des tendances observées pour 2021.

L’Ocirp et Apicil sont donc pour l’heure les seuls susceptibles d’être recommandés pour l’assurance et la gestion du régime mutualisé de la CCN 66-79. A ce stade, des discussions sont toujours en cours avec AG2R, Malakoff Humanis et Mutex (Chorum groupe Vyv).

Les négociations doivent aboutir le 11 septembre dans la même perspective temporelle que pour les CHRS, à savoir un accord valide (signé et sans opposition majoritaire) fin septembre-début octobre 2020. Laissant ainsi le temps aux structures de résilier leur contrat de prévoyance et rejoindre la mutualisation le cas échéant.

La perspective d’un régime commun

Dès novembre 2019, Nexem affirmait sa volonté de construire un régime commun aux deux environnements. Les travaux techniques et les appels d’offre ont été rédigés dans ce sens pour permettre en fonction des réponses des assureurs de bâtir une mutualisation plus forte. Le périmètre du régime des accords CHRS pouvant être mis en difficulté rapidement notamment en cas d’un nombre important de décès. Le périmètre CCN 66-79 pouvant apporter une surface de mutualisation plus importante et des éléments de solidarité plus intéressants pour les salariés et les entreprises. Par ailleurs, en termes de garanties, chacun des deux environnements disposaient d’arguments.

Compte tenu des réponses des assureurs, Nexem et les organisations syndicales ont finalement requis le maintien des conditions tarifaires et des garanties pour 2021 dans chacun des deux environnements. L’histoire et l’équilibre des deux mutualisations ont notamment pesé dans cette décision. Cette perspective à court-terme devenait incompatible avec la construction d’un régime commun pérenne aux deux environnements CHRS et CCN 66-79.

Ainsi, les négociations se poursuivront en septembre dans chacun des environnements et donneront lieu à des accords propres à chacun des champs.

Résiliation du contrat, changement d’organisme assureur et consultation du CSE

Le contrat d’assurance prévoit généralement une faculté de résiliation annuelle au 31 décembre moyennant le respect d’un préavis de 2 mois. Il est donc nécessaire d’envoyer la résiliation par lettre recommandée avec accusé de réception avant le 31 octobre pour une mise en œuvre effective au 31 décembre 2020. Ainsi le nouveau contrat peut prendre le relai au 1er janvier 2021.

Compte tenu de l’objectif de conclure les accords afférents à chacun des régimes début septembre, du délai d’agrément et de la compétence générale du comité social et économique (CSE) pour ce qui concerne les évolutions de la protection sociale complémentaire[1], il semble important de prévoir l’inscription de ce sujet à l’ordre du jour des séances du CSE prévues en septembre et/ou octobre. A l’heure actuelle, les négociations s’orientent vers un maintien des conditions actuelles pour 2021. Néanmoins, seul le texte signé sans opposition majoritaire permettra d’acter le cadre du régime et les évolutions éventuelles.

[1] Article R. 2312-22 du code du travail.