Depuis plus d’un an, la France traverse une période d’instabilité politique inédite. La dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024, la censure du gouvernement Barnier en décembre 2024, puis celle du gouvernement Bayrou le 8 septembre dernier, ont plongé le pays dans une profonde incertitude et fragilisé la capacité de l’État à garantir la continuité de l’action publique. Les prochaines étapes restent imprévisibles et l’enlisement dans une crise politique durable accélère la perte de confiance dans les pouvoirs publics. Dans le même temps, le spectre d’une crise budgétaire durable se précise, dont la perspective d’une “année blanche” en 2026 — synonyme de gel des crédits — constitue l’expression la plus brutale.

Cette instabilité a frappé de plein fouet le secteur social et médico-social, et le dossier du Ségur en est l’illustration la plus éloquente. Depuis plus d’un an, malgré un accord conclu lors du comité des financeurs en avril dernier entre l’État et les collectivités, plusieurs financeurs refusent encore d’honorer leurs engagements, faute d’arbitrages politiques et budgétaires clairs. Les associations se retrouvent alors en première ligne, contraintes d’assumer seules le coût de cette prime, au détriment de leur équilibre financier et de leur capacité à remplir durablement leurs missions. Cette situation s’ajoute à un autre défi majeur : l’écart grandissant entre les financements alloués et les besoins réels du terrain, marqué par l’augmentation du nombre de personnes accompagnées, la complexité croissante des situations et le poids d’une inflation persistante qui épuise les trésoreries associatives.

Malgré ces difficultés et cette crise politique, notre secteur est pourtant resté mobilisé. Les 11 000 structures adhérentes de Nexem et les 360 000 professionnels qui les font vivre ont maintenu leur engagement et ont continué d’assurer l’accueil, l’accompagnement et la protection des publics les plus vulnérables — enfants, personnes âgées, personnes en situation de handicap, majeurs protégés, personnes en grande précarité. Leur action a permis de compenser les manquements de la puissance publique et de préserver la cohésion sociale, apportant une forme de stabilité salutaire à nos concitoyens.

Mais cette situation ne peut durablement perdurer. Les employeurs associatifs ne sauraient constituer indéfiniment la dernière digue face aux renoncements budgétaires de l’État et des collectivités alors même qu’un tiers des associations gestionnaires connaissent aujourd’hui un déficit chronique (source : enquête AXESS 2025).

Dans ses multiples échanges avec les pouvoirs publics, Nexem insiste sur l’urgence d’un soutien budgétaire à un secteur essentiel pour l’accompagnement des personnes les plus fragiles. Les dépenses sociales ne sauraient être traitées comme une simple variable d’ajustement : elles représentent un investissement stratégique pour l’avenir du pays — un investissement dans la dignité des personnes accompagnées, dans l’attractivité et la reconnaissance des métiers du prendre soin, et dans la promesse républicaine d’une prise en charge qui garantit à chaque citoyen, où qu’il vive, la même protection et la même dignité.

En cette rentrée budgétaire, c’est le sens du plaidoyer PLF-PLFSS, ambitieux et responsable, que porte Nexem, autour de 80 propositions car il est urgent de rompre avec l’instabilité et l’imprévisibilité qui fragilisent le secteur, et de donner enfin au social et au médicosocial privés non lucratifs les moyens non seulement de remplir leurs missions, mais aussi de mener leur modernisation attendue par nos concitoyens. Pilier essentiel de notre contrat social, ce secteur doit désormais être reconnu et soutenu à la hauteur des responsabilités qu’il assume chaque jour.