A compter du 1er janvier 2019, concernant la santé au travail, les employeurs sont tenus de négocier un accord d’entreprise relatif à la prévention des risques professionnels dans deux cas de figure :

  • l’association d’au moins 50 salariés comprend au moins 25 % de salariés exposés à certains risques professionnels dans des conditions fixées par décret ;
  • l’association d’au moins 50 salariés dépasse le taux de sinistralité prévu par le décret n° 2017-1769 du 29 décembre 2017 (en application de l’ordonnance Macron relative à la prévention de certains risques professionnels).

Dans l’une ou l’autre de ces situations, à défaut d’accord d’entreprise ou de plan d’action, les associations concernées s’exposent à des sanctions financières. Ces points seront développés dans la première partie de cet épisode.

Par ailleurs, la qualité de vie au travail est devenue une thématique à aborder dans le cadre des négociations annuelles obligatoires, depuis le 1er janvier 2016. Ce point sera développé dans la seconde partie de cet épisode.

1- Négociation d’un accord d’entreprise relatif à la prévention des risques professionnels : dans quels cas est-elle obligatoire ?

Cas n° 1 : association d’au moins 50 salariés, dont au moins 25 % de l'effectif sont soumis à l’un des 4 facteurs de risque professionnel indiqués dans le tableau, au-delà de certains seuils[1]

Facteur de risques professionnels Seuil Durée minimale
Travail de nuit Une heure de travail entre 24 heures et 5 heures 120 nuits par an
Travail en équipes successives alternantes Impliquant au minimum une heure de travail entre 24 heures et 5 heures 50 nuits par an
Travail répétitif caractérisé par la réalisation de travaux impliquant l'exécution de mouvements répétés, sollicitant tout ou partie du membre supérieur, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte Temps de cycle inférieur ou égal à 30 secondes : 15 actions techniques ou plus

Temps de cycle supérieur à 30 secondes, temps de cycle variable ou absence de temps de cycle : 30 actions techniques ou plus par minute

900 heures par an
Bruit Niveau d'exposition au bruit rapporté à une période de référence de huit heures d'au moins 81 décibels (A)

Exposition à un niveau de pression acoustique de crête au moins égal à 135 décibels (C)

600 heures par an



120 fois par an

Exemple. L’effectif d’une association comprend 150 salariés, dont :

  • 10 travailleurs de nuit accomplissent 130 nuits par an, incluant au moins une heure de travail entre minuit et 5 heures du matin ;
  • 4 AMP accomplissent 121 nuits par an dans les mêmes conditions ;
  • 3 éducateurs spécialisés accomplissent 70 nuits par an (non pris en compte).

14 salariés sont ainsi exposés au facteur de risque « travail de nuit » dans les conditions réglementaires sur 150 salariés équivalent temps plein et représente donc 9,33 % des salariés.

Dans cet exemple, l’association n’est pas tenue de négocier un accord d’entreprise relatif à la prévention des risques professionnels.

Cas n° 2 : association d’au moins 50 salariés, dont la sinistralité au titre des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) est supérieure au seuil réglementaire de 0,25[2]

L’effectif de l’association - pour déterminer si elle comprend plus ou moins de 50 salariés - se calcule dans les conditions de droit commun fixées par les articles L. 1111-2 et L. 1111-3 du Code du travail.

L’indice de sinistralité est égal au rapport, pour les trois dernières années connues, entre le nombre d’accidents du travail et de maladies professionnelles imputées à l’employeur (à l’exclusion des accidents de trajet) et l’effectif de l’entreprise tel que défini à l’article R.130-1 du code de la Sécurité sociale.

Pour le calcul du taux de sinistralité, l’effectif est calculé selon les dispositions de la sécurité sociale et correspond ainsi à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l'année civile précédente.

A noter. Les apprentis, les titulaires de contrats aidés et les contrats de professionnalisation ne sont pas pris en compte pour la détermination de l'effectif.

En revanche, les AT-MP les concernant doivent être pris en compte dans le nombre d’AT et de MP à prendre en compte pour déterminer le taux de sinistralité.

Exemple. Une association de 104 salariés - dont 4 salariés en contrats aidés exclus du calcul de l’effectif - comptabilise 26 accidents - dont 1 concerne un salarié en contrat aidé - sur 3 ans.

Son taux de sinistralité sera donc de 26/100 = 0,26.

L’association sera alors concernée par l’obligation de négocier en matière de prévention des risques.

Cas n° 1 et n° 2 : quels facteurs de risque sont visés par l’obligation de négocier[3] ?

Pour rappel, l’obligation de négocier en matière de prévention des risques professionnels concerne les entreprises d’au moins 50 salariés, comprenant au moins 25 % de salariés exposés aux 4 facteurs de risques au-delà des seuils réglementaires (cas n° 1) ou qui ont un taux de sinistralité au-delà d’un taux fixé par décret (cas n° 2).

Dans ces deux cas, l’obligation de négocier devra néanmoins porter sur les 10 facteurs de risques professionnels prévus à l’article L. 4161 du Code du travail, à savoir ceux liés à :

1° des contraintes physiques marquées :

  1. manutentions manuelles de charges ;
  2. postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ;
  3. vibrations mécaniques ;

2° un environnement physique agressif :

  1. agents chimiques dangereux, y compris les poussières et les fumées ;
  2. activités exercées en milieu hyperbare ;
  3. températures extrêmes ;
  4. bruit ;

3° certains rythmes de travail :

  1. travail de nuit ;
  2. travail en équipes successives alternantes ;
  3. travail répétitif caractérisé par la réalisation de travaux impliquant l'exécution de mouvements répétés sollicitant tout ou partie du membre supérieur, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte.

Cas n° 1 et n° 2 : quid en cas d’échec des négociations obligatoires en matière de prévention des risques professionnels ?

En cas d’échec de la négociation, un plan d’action devra être établi par l’employeur. Le défaut d'accord devra être attesté par un procès-verbal de désaccord[4].

Le plan d'action sera établi, après avis des représentants du personnel (comité social économique).

Les entreprises concernées, qui ne sont pas couvertes par un accord ou un plan d'action, sont passibles d'une pénalité financière.

Le montant de celle-ci est fixé par la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte), en fonction des efforts constatés dans l'entreprise en matière de prévention. Il ne peut pas excéder 1 % des rémunérations versées aux salariés au cours des périodes au titre desquelles l'entreprise n'est pas couverte par un accord ou un plan d'action.

Cas n° 1 et n° 2 : quels thèmes doivent être abordés dans l’accord d’entreprise ?

Au moins deux des thèmes suivants :

1- la réduction des polyexpositions aux facteurs de pénibilité mentionnés ;

2- l'adaptation et l'aménagement du poste de travail ;

3- la réduction des expositions aux facteurs de risque.

En outre, au moins deux des thèmes suivants :

1- l'amélioration des conditions de travail, notamment sur le plan organisationnel ;

2- le développement des compétences et des qualifications ;

3- l'aménagement des fins de carrière ;

4- le maintien en activité des salariés exposés aux facteurs de pénibilité.

Chaque thème retenu dans l’accord ou le plan d’action est assorti d’objectifs chiffrés, dont la réalisation est mesurée au moyen d’indicateurs communiqués au moins une fois par an aux membres du comité social et économique (CSE).

Pour aller plus loin. Consultez notre base documentaire consacrée à la pénibilité.

Outil. Téléchargez la trame d’accord en faveur de la prévention des facteurs de risques professionnels.

Précision. Les entreprises dont l'effectif comprend au moins 50 salariés et est inférieur à 300 salariés n'ont pas l'obligation de conclure un tel accord, si elles sont déjà couvertes par un accord de branche étendu comprenant les thèmes mentionnés ci-dessus[5]. Cependant, dans le secteur sanitaire, social et médico-social, il n’existe pas à ce jour d’accord de branche en la matière.

2- Les négociations obligatoires en matière de qualité de vie au travail

La négociation annuelle sur la qualité de vie au travail est devenue obligatoire depuis le 1er janvier 2016, en application de la loi Rebsamen du 17 août 2015. Toutes les associations dotées d’un ou plusieurs délégués syndicaux sont concernées, quel que soit leur effectif.

Quels sont les thèmes à aborder dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire relative à la QVT ?

La loi Rebsamen a, pour rappel, regroupé autour d’un même bloc de négociations l’ensemble des thèmes indiqués dans le tableau ci-après.

Quid en cas d’échec des négociations sur l’un des thèmes en lien avec la QVT et l’égalité hommes-femmes ?

Les conséquences de l’échec des négociations pour chacun des thèmes sont également précisées dans le tableau ci-après.

NAO QVT / égalité professionnelle hommes-femmes : récapitulatif
QVT Pas de sanction si les négociations n’aboutissent pas
Egalité hommes-femmes Accord d’entreprise ou plan d’action - à défaut, pénalité financière
Droit à la déconnexion (en application de la loi travail du 8 août 2016) Si pas accord, mise en place par le biais d’une charte
Droit d’expression Si pas accord, mise en place par décision unilatérale de l’employeur
Articulation vie personnelle / vie professionnelle Pas de sanction si les négociations n’aboutissent pas
Lutte contre les discriminations Pas de sanction si les négociations n’aboutissent pas
Insertion et maintien dans l’emploi des personnes handicapées Pas de sanction si les négociations n’aboutissent pas
Prise en charge des cotisations retraites des salariés à temps partiel Pas de sanction si les négociations n’aboutissent pas

Selon quelle périodicité l’employeur est-il tenu de négocier sur les thématiques mentionnées ci-dessus ?

En l’absence d’accord d’entreprise, la périodicité des négociations portant sur les thèmes mentionnés dans le tableau ci-dessus est d’un an. Elle peut être portée au maximum à 4 ans, par accord d’entreprise[6].

Un accord ou plusieurs accords sont-ils requis pour traiter tout ou partie des thèmes de négociations obligatoires du bloc QVT / égalité professionnelle ?

Compte tenu des accords d’entreprise déjà existants, des objectifs à atteindre, des négociations en cours avec les syndicats de salariés, de l’histoire de votre structure :

  • il peut être décidé en interne de conclure un accord global comprenant à la fois des mesures concernant la SQVT et l’égalité professionnelle. Les indicateurs, index de calcul des écart et mesures permettant de réduire ceux-ci ne sont pas traités dans la série SQVT. Des outils prenant en compte la loi Avenir professionnel[7] seront en revanche prochainement proposés par le groupe de travail Egalité hommes-femmes ;
  • il peut être décidé en interne de conclure un accord ne comprenant que des mesures en lien avec la SQVT

Quelles mesures SQVT sont susceptibles d’être négociées dans un accord SQVT (par exemple) ?

  • Des mesures permettant d’initier ou de structurer une démarche SQVT de manière pérenne (voir épisode 5 de la série SQVT).
  • Des mesures relatives à la prévention de certains risques professionnels, quand bien même l’association n’y est pas tenue légalement (voir outil : trame d’accord d’entreprise relatif à la prévention des facteurs de risques professionnels).
  • Des mesures en lien avec la gestion des emplois et des compétences dans les associations de moins de 50 salariés qui ne sont pas tenus de négocier en la matière (gestion des parcours professionnels, intégration des nouveaux salariés…).
  • Des mesures concernant l’insertion et le maintien dans l’emploi des salariés bénéficiant d’une reconnaissance travailleurs handicapés.
  • Des mesures en faveur des seniors. Et ceci, quand bien même l’ordonnance Macron relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail a mis fin à l’obligation de négocier un accord relatif au contrat de génération et qu’il n’existe donc plus d’obligation de négocier dans ce domaine.
  • Des mesures permettant aux salariés de s’exprimer et de donner leur avis sur l’organisation du travail.
  • Des mesures prévoyant la prise en charge des cotisations vieillesse afin de favoriser le passage à temps partiel de certaines catégories de personnel.

Focus sur les spécificités légales en matière de prise en charge des cotisations retraite par l’employeur

De manière générale, les salariés à temps partiel peuvent demander à continuer à cotiser au régime d’assurance vieillesse à hauteur du salaire correspondant à leur activité à temps plein, avec l’accord de l’employeur.

L'employeur peut prendre également en charge tout ou partie du surplus de cotisation salariale d'assurance vieillesse sécurité sociale qu'entraîne ce dispositif.

Cette prise en charge reste exonérée de cotisations sociales[8]. Les salariés en retraite progressive doivent être informés de ce dispositif.

L'option doit ensuite résulter d'un accord écrit du salarié et de l'employeur, daté et signé par les deux parties. Si l'option vaut aussi pour la retraite complémentaire, il doit le préciser. Si l'employeur prend en charge la part salariale résultant du supplément d'assiette, l'accord doit mentionner la proportion, la durée et les modalités de cette prise en charge[9].

Un accord SQVT pourrait ainsi préciser les modalités de prise en charge des cotisations vieillesse (base et retraite complémentaire) pour les salariés demandant à passer à temps partiel à compter d’un certain âge et/ou en préretraite progressive pourraient ainsi être précisées, afin d’encourager des aménagements de temps de travail en fin de carrière et prévenir ainsi les problèmes de santé liés à l’usure professionnelle.

  • Des mesures permettant une meilleure articulation temps de travail / temps professionnels (droit à la déconnexion, télétravail…).
  • Des mesures tenant compte des contraintes familiales et personnelles (congés familiaux, don de jours de repos, actions en faveurs des aidants familiaux, possibilité d’aménagement du temps de travail…). Concernant les aidants des actions peuvent être financées par les fonds de solidarité (cf. épisode 2).
  • Des mesures de nature à prévenir les risques liés aux arythmies de travail et au travail de nuit ayant un impact direct sur la santé des salariés (rythmes biologiques, sommeil, nutrition…), en partenariat avec des partenaires (services de santé au travail, organismes de prévoyance, mutuelles…). Concernant ces thématiques, des actions peuvent être financées par les fonds de solidarité (cf. épisode 2).
  • Des mesures facilitant le dialogue social sur les questions de santé au travail, auprès des différentes instances des représentants du personnel.

Certaines actions SQVT peuvent s’inscrire dans le cadre d’un accord SQVT et d’autres peuvent être mises en place par l’employeur, après consultation des représentants du personnel. Il s’agit de positionnements répondant à la politique et aux moyens de chaque association.

Exemple de trame d’accord SQVT

Préambule

Indicateurs chiffrés / diagnostic partagé (voir épisode 5 de la série SQVT)

Objectifs et actions SQVT prioritaires

Engagements en termes de moyens humains et financiers

Échéances à respecter pour leur mise en œuvre

Modalités de suivi et d’évaluation des actions SQVT

Durée de l’accord

Périodicité selon laquelle l’accord doit être renégocié (au plus tard 4 ans après la conclusion de l’accord). Attention ! Si aucune périodicité de négociation n’est fixée par accord d’entreprise, l’accord doit être renégocié chaque année.

  • A suivre le 10 janvier 2019, le septième épisode de la série qui proposera des exemples concrets d’actions SQVT déjà mis en place dans notre secteur ou ailleurs.

[1] Article D. 4163-2 du Code du travail.

[2] Décret n° 2017-1769 du 29 décembre 2017 - Article D. 4162-1 du Code du travail.

[3] Article L. 4162-1 du Code du travail.

[4] Article L. 4163-2 nouveau du Code du travail.

[5] Article L. 4162-1 du Code du travail version 2019.

[6] Article L. 2242-1 du Code du travail issu de l’ordonnance Macron n° 2017-1385.

[7] Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

[8] Article L. 241-3-1 du Code de la Sécurité sociale.

[9] Articles L. 241-3-1 et R. 241-0-1 à R. 241-0-6 du Code de la Sécurité sociale.